Ya un truc que j’peux pas digérer !
Dans ton hangar, être obligé de côtoyer, pour l’éternité d’une vie de marionnette, tes créatures décaties ou déformées par la méchanceté, je ne supporte plus. Et ces vieilles dont je me demande comment tu peux les faire parler. Dans la vraie vie, ça fait longtemps qu’on les aurait balancées en enfer.
Et moi, tu m’as vu ? Avec ma tête, côté face, de benêt, de ravi de la crèche, et côté pile, de crâne d’homo erectus, et cyclope par- dessus le marché ! On peut dire que t’as des comptes à régler avec les ministres du culte, parce que les autres, ils valent pas mieux ! Mais eux, c’est plutôt dans le genre suppôts de l’Inquisition.
En fait, je m’aperçois que c’est toi que j’ai du mal à avaler. Toi et tes scénarios à la noix. Dès que tu m’as fait jouer, j’ai eu envie de me cacher. Mais comment échapper aux mains de fer de son créateur ? Et que j’te joue les Tartuffe, et que j’te fasse le Jésuite ! J’ai toujours eu honte. Moi, je rêvais d’être Pierrot. Arlequin à la rigueur. Non, rien à faire. Sans arrêt des textes de plus en plus noirs. L’hypocrite, le type qui fait ses coups en douce.
Ah zut, ya plus rien dans le frigo !
Et ce soir, ça a été le comble. Tu m’as fait m’acoquiner avec le Grand Confesseur pour abuser de Colombine ! Trop c’est trop ! J’ai craqué. Alors, après la représentation, je suis resté le type qui fait ses coups en douce. Pas si en douce que ça d’ailleurs. Quand tu as pris la bouteille pour le bon coup d’après spectacle, ça n’a pas été le bon coup prévu. Comme d’habitude, tu me tenais encore, « pour me faire partager le plaisir du succès », que t’as dit. Pour m’humilier un peu plus en picolant sous mon nez, parce que moi bien sûr, tintin, je ne suis qu’une marionnette
Bon sang ! T’avais bien laissé l’Hépatoum dans ce fichu frigo !
Et t’as rien compris quand la bouteille t’a atterri sur la tronche. Tu ne la commandais plus. Je t’ l’avais prise des mains et j’ai tapé ,tapé, comme un fou, jusqu’à en avoir fini avec toi et tes fantasmes morbides ! Et puis, en bon Homo érectus, je t’ai bouffé, pour te faire disparaître définitivement !!!
Ya un truc que j’peux pas digérer !
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