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texte du mercredi matin

Espérance.

vestibuleLe sol de ce hall d’entrée est carrelé en blanc et noir.
Je m’amuse à marcher en diagonale pour atteindre l’escalier.
La lumière de la fenêtre est aveuglante.
Je m’assieds un instant sur la 1ere marche pour refaire mon lacet. Mon genou saigne. Je regarde mes poils collés par le sang séché et la saleté du bitume.
J’ai pleins de cicatrices sur mon corps.
J’en suis très fière.
Dans le quartier on m’appelle la sale môme. Un vrai garçon manqué comme ils disent.
Mais je les emmerde ces donneurs de leçon.
Ça y est, je l’entends gueuler. Elle s’est réveillée elle veut sa dose.
Oui, j’arrive! T’inquiètes pas, tu vas l’avoir ton gin.
C’est la seule chose qui fait que je sois importante à tes yeux. Ta dose.
Je me rappelle le jour où il est parti.
Il était assis dans l’entrée sur le banc en bois. Sa valise à ses pieds.
Il m’a regardé, ne m’a pas parlé.
Il s’est levé, m’a caressé la tête comme pour me souhaiter du courage et a refermé la porte derrière lui.
J’ai écouté son pas longtemps dans l’escalier. Son pas lourd.
Espérant qu’il revienne, qu’il me dise « viens, je ne peux pas te laisser, tu ne dois pas subir ça. Viens, je te protégerai, on sera ensemble, on sera plus fort. De toutes façons on ne peut pas l’aider, elle est déjà foutu, déjà morte. Ce qui l’a maintient en vie c’est sa fiole qui une fois ingurgitée l’endors. »
Oui! J’arrive, arrête de gueuler.
Je me lève. Je regarde un moment l’arbre de la cour. Je l’ai toujours bien aimé cet arbre.
Il m’apaise, me rassure, me donne de la stabilité, de la force.
Je monte l’escalier le plus lentement possible regardant ma main sur la rampe en bois, comptant les marches comme je le fais à chaque fois. Me disant que peut être un jour quand j’arriverai en haut ce sera finit. Je ne l’entendrai plus gueuler, je ne l’a verrai plus tituber, elle sera morte étouffée par son vomi.

En manque.

Je me souviens de ma douleur.
Je me souviens de ma souffrance.
Je me souviens de ma croyance.
Je me souviens de tout.
Je ne me souviens de rien.
De mon corps brisé, de ma tête malade.
De mon manque de toi.
De ma peur, de mon déséquilibre.
Je renifle partout.
Je cherche mais ne trouve pas.
La seule chose qui me vient ce sont des souvenirs.
Mais on ne vit pas sur des souvenirs.
Je cherche.
Je lèche les murs.
vitre

 

Je me cogne.
Je tombe et me relève.
J’aimerai pouvoir crier mais je n’ai plus de voix.
Je n’ai plus rien, j’ai tout perdu.
Mes sens sont sans dessus dessous.
Telle une toxico je veux ma dose.
Mais tu veux plus dealer.
Sevrage radical.
Je cherche.
Mon corps est douloureux.
Je suis la paroi comme on suit la ligne blanche.
Je cherche.
Je te cherche.
Mais tu n’es plus là.
Je suis perdue.

Seul

homme debout

 

Je suis seul.
Clown triste dans une lumière crue.
Ballotté par la vie. Pantin influençable.
Je me regarde dans ce miroir, seule fenêtre dans cette chambre froide.
L’image qu’il me renvoie est floue, comme mes souvenirs.
Souvenirs d’une jeunesse interrompue par un éclat de vie.
Je suis seul et j’ai peur.
Peur de me rappeler.
Et pourtant ça cogne, ça tape dans ma tête.
C’est chaud, c’est rouge.
Je me retire dans un coin de cette pièce aux murs défraîchis.
Je me retire derrière ces barrières de folies qui m’évoquent des étagères vides.
Pieds et mains liés, ma seule liberté serait la pensée.
Je suis seul.
Ma vie, je le sais, je l’avais rêvé.
Tant de fois imaginée.
Comme un slogan publicitaire.
Tout était parfait.
Je suis seul alors que nous aurions pu être deux.
Silence criant, peinture violente.
Elle, si belle.
Je l’a voulais.
Je l’a désirais.
Je faisais profil bas, écoutant d’un regard appuyé son oreille distraite.
Ampoule grillée, plafond cloqué.
Je me sens humide.
J’ai peur.
Si seulement elle m’avait écouté. Je lui aurais murmuré. Je n’aurais pas crié.
Je voulais juste que mes lignes croisent ses courbes.
Merde. Je me suis pissé dessus.
Il faudrait qu’ils me changent.
Mort vivant dans un rêve. Je vais m’éveiller tu seras là.
Je suis seul.
Je me déplace.
Danseur dégingandé, je me cogne contre les murs capitonnés.
Mon corps est meurtri.
Ma tête est malade.
Regard horizontal sur une peur véritable.
Je suis seul.
Je te revois allongée sur ce lit.
Tu es belle à en crier, belle à en crever.
Maison close.
Passage verrouillé.
Silence criant, peinture violente.
Je veux juste t’aimer.
Tel un manteau réchauffer ton corps échaudé.
Tu es belle dans ce t-shirt souillé, l’empreinte de mes doigts sur ton décolleté.
Je suis seul .
Ne crie pas.
Je respire les murs pour trouver ton odeur.
Les yeux me piquent.
Je voudrais dormir mais je n’y arrive pas.
Tu es là. Tu ne bouges pas.
Mariage forcé d’une liaison fatale.
Ne bouge pas. Reste là.
Prends ma main. Viens te dis-je.
N’aie pas peur.
Viens.
Pourquoi ce regard ?
Arrête. On dirait que tu m’en veux .
De quoi ?
De t’aimer ?
De vouloir te protéger ?
Allons ferme tes yeux.
Cesse de me fixer avec ce regard vide.
Là, je te les ferme, ça va aller.
Tu es belle.
N’aie pas peur, je suis là.
Détends toi, tu es toute crispée.
Nous sommes ensemble à jamais.

dis moi pourquoi

juillet-122
 
-Dis maman, dis moi pourquoi
-Mange ta soupe et puis tais-toi
-Oui mais maman dis moi pourquoi
Quand tu s’ras grand tu comprendras
C’est des paroles de grandes personnes
Des choses qu’on dit des mots qu’on donne
Que des voyelles et des consonnes
-Dis maman dis moi pourquoi
-Plus tard tu verras tu sauras
Un jour j’suis sure tu comprendras
-Dis maman dis moi pourquoi
-Va faire ton lit et oublie ça
-Oui mais maman dis moi pourquoi
-Un jour je sais tu comprendras
Pour le moment je sais c’est dur
Comme une brulure une écorchure
L’enfance qui passe à toute allure
-Dis maman dis moi pourquoi
-Je ne peux pas te dire pourquoi
-Oui mais maman, allez dis le moi
Dis moi si un jour  il r’viendra…
-je sais pas…