Etat d’âme pictural !

theo van doesburgLe peintre

 

Moi, réaliser une œuvre d’art, cela me prends 5mn. Je ne peux ni le dire ; ni l’écrire comme cela.

Si j’ai accepté de détailler, la réalisation de cette toile de maitre, c’est que Art et Création est une revue qui à de bon argument, 6000 dollars. Ce n’est pas rien. Money is money !

« Il nous faut du lourd, les lecteurs ont besoin de savoir, de comprendre la quintessence de votre génie créatif »

Génie créatif ! Mon œil ! Moi avant d’être un artiste admirablement adulé, j’étais architecte et encore avant j’étais peintre en bâtiment. Alors !

 

Si je m’en tiens à la réalité, si je décris exactement le processus créatif de ma dernière toile « Composition » cela va être rapide.

La toile est déjà là, à terre ; elles sont toutes à terre. 5 pots de peintures de couleurs vives, 5 rouleaux de tailles différentes, 19 allées et retour, et voila, fini le chef d’œuvre !

 

Mon génie créatif s’est exprimé. Mon banquier va être des plus satisfait. Dans quelques mois ce chef d’œuvre sera vendu chez Sotheby’s au bas mot 3 millions de dollars.

J’suis cynique, que c’est bon. Vive l’argent.

 

Mais bon voila, Art et création m’a déjà payé pour cette article.

Il me faut maintenant avoir un peut d’imagination ; place donc au récit d’élaboration créatif.

Un peut de fiction, un peut d’effort que diable !

 

« Seul dans l’atelier, je prends les toiles une à une, je les soulève, je les observe, elles sont à priori toutes blanches, vierge de toutes interventions humaines, et pourtant, je sais que c’est celle là qui accueillera « Composition ».

L’atelier est silencieux, la toile est là devant moi, elle me parle, elle agite mes zygomatiques picturaux.

Les parcelles de couleurs se mettent en place. Le rouge ici, le blanc là, le bleu à coté, le noir plus loin…

Le tableau est présent dan mon esprit. Le processus créatif bas sont pleins, mes yeux sont fermé, je peints, je dors éveille, je rêve, je suis le tableau…

Composition, mon œuvre principale est là devant moi, abouti, réellement merveilleuse, vivante ! »

 

Bon voilà, c’est pas mal ! Je vais me servir de cette base pour l’article d’art et Création. Manque plus que d’appeler mon nègre littéraire plus qu’il étoffe ça et le tour est joué

Quel pied !

Money is money ! La journée commence bien.

 

La toile de maitre.

 

Moi, une toile de maître ! Impossible. Comment peut-on créer une toile de maître en 5mn ?

Ah ; le salaud, 5mn, pas une de plus, pas une de moins. C’est simple, je pense que, non non je ne pense pas. Je le sais, j’en suis sûre. C’est une certitude : il peint comme il baise.

Rapidement et sans état d’âme. Ah, qu’est-ce qu’il peut être fier et arrogant.

Toujours plus vite, toujours plus malin, toujours plus d’argent ; c’est un prédateur, je le déteste.

Combien de fois s’est-il servi de nous pour attirer de jeunes proies dans l’atelier. Je l’ai vu. Je le voie à l’œuvre. Séducteur et très professionnel.

Quand je dis qu’il peint, comme il baise, c’est tout à fait cela. Une toile, un tableau, une fille, un modèle, au suivant !  J’attire, je séduis, je consomme.  Je peins, je signe, je vends.

Moi, il ma prise à terre. Quand j’y repense, dégueulasse. C’est couché à même le sol qu’il me passa dessus avec ses rouleaux. A peine avais-je réalisé ce qui c’était passé, que c’était déjà fini.  Ce qui devait être un pur moment d’extase, se transforma en outrage aux bonnes mœurs picturales. Lamentable. Emballée c’est pesé, à la vente, au suivant.

Moi, ce que j’aurais aimé, c’est qu’il me soulève de terre, de ses deux mains puissantes. Ce que j’aurais souhaité, c’est qu’il m’entoure de ces deux bras robustes puis, délicatement ; qu’il me dépose sur le chevalet.

Là, peut-être aurai-je senti son souffle, son odeur, son ardant désir de peindre, de créer une véritable œuvre d’art contemporaine.

Moi, à ce moment-là, j’aurais tendu ma toile, je me serai tenu bien droite, vierge de toutes souillures, prête à recevoir les premières caresses des pinceaux délicats. Puis, dans un vas et viens, que seul les grands maitres possèdent, les rouleaux auraient déposé sur ma fragile personne les premières couleurs de la volupté. J’imagine les frôlements des pinceaux, je frissonne à l’idée d’être caressé par leurs poils graciles, d’être recouverte de couleur dans ce flux et reflux incessant.

Peut-être même, aurait-il délaissé brosses, pinceaux et rouleaux. Alors, laissant libre cours à son génie créatif, c’est avec son corps qu’il aurait pu me posséder, qu’il aurait pu créer une vraie toile de maitre. Je rêve de ses mains, de ses doigts, de ses bras, de tout son corps recouvert de peinture.

Il aurait pu aussi changer de pratique, prendre fermement entre le pouce et l’index ses couteaux de peinture. Créer du volume, rajouter de la matière et ; progressivement ; sculpter la peinture sur ma toile.

Petit à petit, j’aurai pris de l’ampleur, de peinture je serai devenue sculpture. A ses yeux, d’objet inerte je me serai transformé en compagne artistique ; propice à la rêverie et à la création.

Il m’aurait gardé avec lui, pour la vie, pour l’éternité. Lui et moi, fusion de la matière et de l’art, unique et grandiose dans l’amour de la peinture, dans l’amour de l’art.

 

Vous savez quoi, en définitive, je crois que je suis amoureuse.

 

 

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