Si on pouvait écouter la bande sonore de cette image de Tod Papageorge, prise au Central Park de New-York, cela aurait pu être la chanson de Léonard Cohen « Suzanne », diffusée par le haut- parleur d’un petit transistor.
La voix grave et suave du chanteur enfouie dans un léger grésillement de l’écoute de cette radio à piles.
C’était sans doute l’été, en mi-journée, le soleil au zénith, et rares les bruits d’oiseaux pour contrarier le son du transistor mis à faible volume.
Une ouïe fine et attentive aurait pu percevoir seulement en plus de la musique, le frôlement du pantalon en cuir de la belle jeune femme effectuant des ciseaux avec ses cuisses et les demi retournements de son corps allongé sur ce rocher et entremêlé avec ceux de ses copines et de leur copain garçon elles et lui en tenue de bain.
Parfois aussi le clic-clac du décapsulage d’une canette de bière en métal ou le crissement du sachet plastique de chips que picoraient avec un léger craquement, chacun à leur tour les jeunes gens visiblement en pause détente.
Autour d’eux aucune force de vent de ce jour d’août pour agiter les herbes folles et disputer le murmure des lents clapotis de l’eau calme du lac.
De ce petit groupe comme enlacé les uns avec les autres, s’échappaient des mini gloussements féminins ou des rires étouffés du garçon.
Les peaux de leur corps à moitié dénudés s’effleuraient dans un frôlement à bruit feutré dans les déplacements au ralenti de leurs bras et torses, quand ils essayaient de faire un peu d’ombre avec leurs mains.
Au loin des plouf de baigneurs, mais ces post-adolescents n’étaient venus là que pour se reposer, pas de jeu de corps à corps érotisé dans leur gestuelle lente, leurs os grinçaient sur ces roches dures et brulantes et seul le linge des serviettes de coton qui les protégeai de cet inconfort laissait passer un faux bruit.

Philippe Courtemanche

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