Atelier Bonnefoy du 15 octobre 2014

En venant avec sa guitare et son ampli au pied du donjon de ce château qui avait été fort en gueule, et qui n’était plus que fort ruiné, il pensait y être tranquille pour répéter son concert du soir.
Il commença par tomber la veste et dans une oubliette où des générations de promeneurs s’étaient oubliés. Bonjour l’odeur ! Et comme il était plutôt baraqué,il eut un peu plus de mal à en sortir qu’à y entrer. Finalement, il ne s’en tira pas mal. Quelques égratignures, mais son matos n’avait pas souffert. Il s’avança vers ce qui restait de la cour, en cherchant l’endroit où le son serait le meilleur. La première tour lui joua un tour de cochon: des créneaux craignos tomba une pierre qui faillit écrabouiller l’ampli. À la deuxième tour, ce fut moins violent, mais un mâchicoulis de framboise goutta sur sa guitare et il dut la lécher pendant une plombe pour nettoyer les contacts. Jamais deux sans trois. Heureusement, la troisième fut une tour de magie. Dès qu’il s’approcha, elle se redressa sur ses ruines, suivie par les remparts qui, rapidement, reprirent leur aspect d’origine .Quand il s’approcha des murmurailles, il entendit un bruit confus qui s’amplifia peu à peu, au fur et à mesure que des dames richement parées de soies et de brocards apparaissaient dans la cour. Sous leur hennin, elles hennirent d’excitation à la vue de l’étrange balèze troubadour qu’elles trouvèrent bien zaudacieux , avec son instrument bizarre, pour venir s’aventurer zen ces lieux ! L’une d’elles, sans doute la maîtresse de cette demeure, vint vers lui et l’invita, mais il refusa de la suivre dans une échauguette, échaudé par l’expérience des créneaux craignos et des mâchicoulis. Elle réussit à l’entraîner dans l’embrasure d’une fenêtre à moineaux pour écouter le chant des oiseaux. Le dialogue à venir s’annonçait plein de promesses, malheureusement il fut interrompu, avant même d’avoir commencé, par la trompinette du garde-fou qui annonçait le retour du maître des lieux. Le garde-barrière abaissa le pont -levis et le saigneur des lieux brandissant son coutelas d’égorgeur, entra suivi de sa troupe de garde-à-vous. A peine eut-il posé pied à terre, il cria : « J’ai faim ! ». Un garde-manger se précipita. A ce moment, découvrant sa dame en courtoise compagnie, le saigneur, en levant haut sa lame, se rua sur le guitariste qui n’eut que le temps de brancher son ampli. Poussant les décibels et des cris de fou furieux, il réussit à clouer sur place l’époux vindicatif. « Qui es-tu étrange étranger ? – Je suis le soldat inconnu de la Guerre de Cent Ans et je retourne à mon anonymat !!! »
Et il plia vite fait ses gaules, laissant ses hôtes pantois.

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