I-mage

Expo Vanessa Winship Château d'eau TLSE

Expo Vanessa Winship

 

 

Joies et turpitudes des nouvelles technologies. Eliminés de nos bibliothèques ces vieux albums photos que nous organisions avec tant d’amour.

Sur l’ordinateur, un clic et vous revoyez toutes vos images bien rangées en thèmes, années ou divers pour marquer les étapes de votre vie.

USA 2010, j’avais déjà cinquante balais et ce fut l’un de mes voyages le moins exaltant que j’ai eu à faire dans l’Amérique profonde.

En photographie, ce que je déteste le plus souvent, ce sont ces clichés vides où il ne se passe rien. Pourquoi avoir filmé ce lieu comme un décor en construction, dévasté dont on ne sait de quelle intempérie météorologique, large croissement dans une zone semi industrielle sordide. Et pourquoi l’avoir imprimée en A4 pour l’afficher sur le mur de mon bureau.

Chaque fois que je m’installais dans cette pièce pour y écrire, mon regard invariablement se dirigeait d’abord sur cette image, elle décrivait au loin comme une gare de péage et éparpillées des grosses bagnoles abandonnées.

La regarder me renvoyer le plus souvent à recevoir un grand coup de pied aux fesses, et une voix intérieure me disait avec la plus ferme intention : «  attention bonhomme ne te laisse pas prendre par la névrose du moche et du tout fout le camp. » Ce qui m’intriguait d’abord c’était ce faux terre-plein aménagé au centre de la route avec des palmiers rabougris et ce panneau indiquant la 17éme avenue.

Un matin je fus surpris de découvrir un cheval juché sur un pylône style pylône de transport électrique de haute tension. Et cette fois c’est ma tension qui fit un bon. Cette grue métallique épousait la forme du luminaire d’éclairage public, installé à côté d’elle, une forme d’arc, et je distinguais pleinement cet équidé, surement une jument. Mais que pouvait bien faire cette statuette de canasson de course en équilibre à plus de 20 mètres au-dessus du vide. Les nuits suivantes, je me levais pour aller observer la descente inexorable de cette structure métallique perdue comme dans un paddock d’entraînement de concours de saut d’obstacles, et les nuits suivantes, ma tête se mettait à chauffer comme à la suite d’ingurgitation de plusieurs verres de vieux Torres.

Un soir, le jour de la sainte Pauline, ma tête a explosé, patatras la grue s’écroule, en un enchevêtrement de tôles, le cheval, la sculpture de la jument à terre les quatre fers en l’air. Il y avait bien longtemps que j’avais abandonné le monde des courses et des compétitions. Et là, une fois encore j’allais blesser mortellement ma jument, comme le jour où je l’avais obligée, ma jolie et jeune pouliche Pauline à franchir un haut obstacle vertical de trois rangées de barres. Enfouie sous cet amas de bois qu’elle venait d’avoir brisé, morte de crise cardiaque, comment un si jeune animal pouvait-il mourir de la sorte ? Moi, jeune cavalier trop arrogant et pas assez expérimenté, je fus peu digne, mon cœur brisé ne suffisait pas à effacer la douleur et j’ai dû renoncer à ce sport.

De rage j’arrache cette photo, quitter cette pièce et d’un clic effacer toutes ces photos d’Amérique, pour retrouver enfin un apaisant sommeil.

 

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